Thales quitte son activité signalisation ferroviaire pour d’autres secteurs plus prometteurs

Thales quitte son activité signalisation ferroviaire pour d’autres secteurs plus prometteurs

La compagnie a annoncé l’ouverture de négociations exclusives avec le japonais Hitachi Rail, afin de céder à cette société son activité « Systèmes de transport terrestre », pour une valeur d’entreprise estimée à 1,66 milliard d’euros. Cette opération est destinée, apprend-on, à donner à Thales les coudées franches pour se consacrer à ses autres activités, notamment dans les domaines de l’aéronautique ou de l’aérospatiale.

 L’actualité

Après la mise en vente, depuis avril dernier, de l’activité de signalisation ferroviaire de Thales, Reuters a présenté, il y a quelques jours, le suisse Stadler Rail et le français Alstom comme les deux grands favoris pour la conclusion de l’opération. Finalement, c’est un groupe non européen, en l’occurrence le conglomérat industriel nippon Hitachi, qui a obtenu le droit de mener des négociations avec Thales, au détriment d’autres sociétés comme l’allemand Siemens ou l’espagnol CAF. « Le dossier d’Hitachi Rail était le meilleur sur tous les plans : industriel, valeur économique, perspectives pour les salariés », avance Patrice Caine, le PDG de Thales, pour justifier ce choix un brin étonnant.

Ce partenariat a même reçu l’approbation de l’État français, actionnaire à 25,7 % de Thales, qui a sans doute obtenu l’assurance que les 8 000 employés de ce secteur en passe d’être cédé ne seront pas licenciés. Notons que le montant de l’accord, 1,66 milliard € pourra être révisé à la hausse d’ici la finalisation de l’accord, prévue pour fin 2022 ou au plus tard au cours du premier trimestre 2023, soit dans moins de deux ans. Si l’accord avec Hitachi permet à ce dernier de devenir un leader mondial sur le marché de la signalisation ferroviaire, il représente surtout une opportunité pour Thales de se concentrer sur d’autres activités.

Pourquoi quitter l’activité transport ferroviaire ?

Alors que l’activité « Systèmes de transport terrestre » est présente dans une quarantaine de pays et représente une part importante du chiffre d’affaires (10 % des ventes) de Thales, la décision du groupe d’électronique et de défense de céder cette branche peut surprendre. Si elle était déficitaire il y a quelques années, l’activité « Systèmes de transport terrestre » est devenue rentable et la société vise même 8,5 % de rentabilité dans les années à venir, contre 7 % actuellement. Il faut donc souligner que la cession répond à d’autres impératifs et traduit une nouvelle stratégie. Ainsi, la société veut par exemple renforcer son positionnement stratégique dans trois autres secteurs à fort potentiel de croissance que sont l’aérospatial, la Défense et la sécurité, l’identité et la sécurité numériques. Cela lui offrira également les moyens d’accélérer la progression de la marge de son bénéfice avant intérêts et impôts sur les prochaines années.

Toutes ces bonnes nouvelles devraient d’une certaine manière rassurer les investisseurs, car la diversification était considérée comme un handicap plutôt qu’un avantage. Il faut savoir que les exploitants de chemins de fer sont depuis quelques années dans une logique d’intégration sur l’ensemble de la chaîne de valeur. Le directeur général adjoint stratégie, recherche et technologie de Thales résume cela dans une expression assez évocatrice, le « passage de la voie au train », qui suppose par exemple l’installation de davantage de capteurs dans les véhicules. Cela oblige donc Thales à nouer très souvent des partenariats plus ou moins profitables avec d’autres acteurs du marché afin de gagner des contrats. Une stratégie qui n’est pas sans conséquence puisque la compagnie perd en efficacité.

« Avec ce mouvement stratégique important, nous allons pouvoir nous concentrer sur le développement de 3 grandes activités de hautes technologies en croissance à long terme et capables de générer des marges à 2 chiffres dans la durée », poursuit le PDG de la compagnie.

En prélude à cette scission, la compagnie a revu ses prévisions pour l’avenir. Elle prévoit ainsi un chiffre d’affaires de 15,8 à 16,3 milliards d’euros, soit une baisse de 2 milliards environ comparé aux revenus de 17,5 à 18,0 milliards d’euros évoqués lors de la publication des résultats du premier semestre.

De bons résultats au premier semestre

De bons résultats au premier semestre pour Thales

Le 23 juillet dernier, Thales a en effet publié ses résultats pour les six premiers mois de l’année. Son bilan financier sur la période est satisfaisant avec un chiffre d’affaires qui a augmenté de 8,7 % en glissement annuel pour atteindre 8,4 milliards d’euros. Un résultat qui semble meilleur que celui attendu puisque la société a revu l’objectif de son chiffre d’affaires, avant que la scission envisagée actuellement l’oblige, comme indiqué plus haut, à reconsidérer ses ambitions. Les plus fortes hausses sont à signaler du côté des bénéfices. On note en effet un EBIT en hausse de 121 % à 768 millions d’euros, alors que le bénéfice net ajusté a bondi de 155 % pour atteindre 591 millions d’euros. Enfin, le bénéfice net consolidé tient la palme d’or avec une hausse impressionnante de 565 %. Il a atteint 433 millions d’euros.

« Les résultats semestriels 2021 de Thales enregistrent un très fort rebond, démontrant à nouveau la résilience de notre business model et la pertinence des choix stratégiques - technologiques et industriels - mis en œuvre », s’est réjoui Patrice Caine. Il explique cette bonne dynamique par le rendement solide enregistré dans le spatial, la défense et la cybersécurité. Faut-il le rappeler, ce sont précisément sur ces branches que veut miser l’entreprise au cours des prochaines années, grâce à la scission opérée vis-à-vis du secteur ferroviaire.

Toutefois, notons que ce bilan assez intéressant aurait pu l’être davantage, sans les mauvais résultats de certains secteurs comme l’aéronautique civile. Ce dernier subit en fait le contrecoup de la crise sanitaire actuelle, avec les restrictions mises en place dans plusieurs pays du monde.

Se tourner vers l’avenir

Après une année 2020 difficile et ce bon début d’exercice 2021, Thales est désormais résolument engagée vers des stratégies de croissance pour le futur. « Le monde de demain exige dès aujourd’hui des solutions digitales contribuant à un monde toujours plus sûr, plus durable, et plus inclusif, ce qui ouvre un champ croissant d’opportunités de développement pour Thales », rappelle Patrice Caine, le PDG.

En France, Thales emploie plus de 34 000 collaborateurs répartis sur 70 sites dans sept régions du pays. Il s’agit notamment du Pays de la Loire, de la Bretagne, de l’Île-de-France ou encore de la région PACA.