Dans un communiqué de presse publié sur son site web le 31 mai, le Conseil européen a annoncé le lancement officiel du plan de relance européen adopté en juillet dernier. Les autorités de Bruxelles ont en effet reçu les notifications formelles de tous les 27 États membres indiquant que les procédures nationales de ratification ont été achevées. Place désormais à la mise en œuvre de ce plan colossal de 750 milliards € destiné à redonner vie à l’économie européenne.
Accord historique
Next Generation EU, le plan de relance ratifié par les pays membres de l’Union européenne est inédit à plusieurs égards. C’est l’une des raisons qui expliquent même le temps qu’il a d’abord fallu pour le négocier et l’adopter, puis le ratifier par tous les États (près d’un an entre les deux dates). Par son montant déjà, dont 672,5 milliards € seront consacrés à une facilité pour la reprise et la résilience (FRR). Il s’agit d’ailleurs de la deuxième innovation majeure du plan de relance puisque la FRR sera mobilisée par le biais d’un emprunt commun. C’est en effet la première fois que les pays membres s’entendent pour solliciter le marché des capitaux.
« Concrètement, la Commission lance ce 1er juin le processus d’émission de dette en réunissant de grandes banques internationales et européennes, et l’émission de titres aura lieu ce mois-ci », confirme auprès des Echos Clément Beaune, secrétaire d’État français responsable des Affaires européennes.
Ce mouvement d’ensemble est à la hauteur de la crise économique induite par la pandémie de Covid-19. Les fonds serviront donc à faire face aux conséquences économiques et sociales de la crise sanitaire au niveau des États et indirectement des entreprises. Par ailleurs, le financement obtenu par l’UE auprès des marchés financiers ira aussi soutenir plusieurs projets en phase avec le développement durable, notamment dans les secteurs de la transition écologique et numérique. Les politiques pour les générations futures seront concernées, ainsi que l’emploi, la cohésion sociale et territoriale et enfin la santé. Le remboursement des sommes empruntées se fera, apprend-on, jusqu’en 2058 au plus tard.
Plan triennal
Notons que la FRR est constituée de 312,5 milliards d’euros de subventions en faveur des États membres. Pour y avoir droit, chaque pays doit soumettre son plan « pour la reprise et la résilience » à la Commission européenne qui en examinera la conformité dans un délai de deux mois. Le Conseil européen disposera ensuite de quatre semaines pour approuver chaque plan grâce à une décision exécutive. Cette étape bouclée, les différents versements s’étaleront jusqu’à 2023, avec 70 % du montant qui sera distribué d’ici décembre 2022. Il faut souligner que chaque pays ne recevra pas le même montant, car les subventions seront distribuées selon les critères suivants : la population, le PIB par habitant et le taux de chômage sur la période 2015-2019. En ce qui concerne les 30 % restants, environ 94 milliards d’euros, ils seront distribués en 2023 en tenant notamment compte du PIB des pays membres sur la période 2020-2021.
Quelle part du gâteau pour la France ?
Comme tous les autres pays membres, la France fait partie des bénéficiaires de la facilité pour la reprise et la résilience. Le gouvernement français a d’ailleurs soumis son plan de relance le 28 avril dernier à Bruxelles, en compagnie de ses voisins allemand et italien, mais aussi de l’Espagne. Si le processus d’examen et de validation aboutit logiquement, l’État français recevra près de 40 milliards d’euros dans un premier temps.
Cela fera de l’Hexagone le troisième plus gros bénéficiaire de la FRR, derrière l’Espagne et l’Italie, dont les subventions sont estimées à 70 milliards d’euros chacun. La France se retrouvera néanmoins juste devant la première puissance économique de la zone euro, l’Allemagne et ses quelque 25 milliards $. Par ailleurs, au cas où l’Élysée solliciterait le prêt proposé par l’UE après 2023, la France pourrait obtenir jusqu’à 168,4 milliards, pour une enveloppe globale estimée donc à 208 milliards d’euros, juste derrière l’Allemagne cette fois-ci.
Il faut souligner que le soutien de Bruxelles aidera le gouvernement français à financer son propre plan global de relance estimé à 100 milliards d’euros. Si elles sont réellement accordées, les subventions de l’UE représenteront en effet plus du tiers de ce plan adopté en septembre dernier et considéré comme la « feuille de route pour la refondation économique, sociale et écologique » de la France.
Les objectifs du plan de relance français
Dans son plan présenté à Bruxelles fin avril, la France prévoit de consacrer 21 milliards d’euros des fonds qu’elle recevra de l’UE à des projets écologiques. C’est en effet l’un des principaux axes des investissements présentés le 3 septembre 2020 en Conseil des ministres par Bruno le Maire. Au total, ce sont 30 milliards d’euros qui devraient être consacrés à la transition écologique entre 2020 et 2022.
Un accent particulier sera mis sur la rénovation des bâtiments publics, logements sociaux ou locaux des petites et moyennes entreprises, afin de réduire leur facture énergétique. Tout cela sera financé à hauteur de 6,7 milliards d’euros, alors que 2 milliards seront consacrés au développement de l’hydrogène vert. Le développement des transports en commun et de l’usage du vélo d’une part et la transition écologique dans le secteur agricole recevront chacun 1,2 milliard.
Par ailleurs, 34 milliards $ seront utilisés pour rendre la France davantage compétitive et améliorer la souveraineté économique, ainsi que favoriser l’innovation. Des baisses d’impôts en faveur des entreprises sont au programme (20 milliards €), de même que le soutien aux projets innovants (1,95 milliard d’aides prévues).
Pour finir, le gouvernement a annoncé qu’il consacrera 36 milliards d’euros à la cohésion sociale et territoriale, ce qui fait d’ailleurs partie des objectifs fixés par l’UE. Dans ces deux secteurs, la France prévoit d’investir 7,6 milliards d’euros pour assurer la sauvegarde de l’emploi, principalement au sein des entreprises largement affectées par la crise sanitaire. Il s’agira également d’assurer la formation des salariés en activité partielle depuis le début de la pandémie de Covid-19. Plus de 6,5 milliards d’euros seront en outre affectés à l’emploi des jeunes, alors que 5,2 milliards iront aux collectivités territoriales et près de 2 milliards à la formation professionnelle.