Il y a environ un an, le prix des contrats à terme du pétrole était, pour la première fois de l’histoire, tombé à moins de zéro. Aujourd’hui, l’or noir se négocie à son plus haut niveau depuis 13 mois. Le Brent se négocie au-dessus de 63 dollars le baril au moment de la publication, tandis que le WTI se négocie autour de 60 dollars.
Le WTI a dépassé la barre des 60 dollars après avoir été en zone rouge en avril 2020.
Au cours des trois derniers mois, le pétrole a progressé de plus de 50 %. Les investisseurs se demandent s’il s’agit d’un nouveau supercycle des matières premières. Toutefois, ce sentiment n’est pas partagé par tous les experts, certains affirmant qu’il serait trop tôt d’entrevoir une tendance haussière à long terme.
Qu’est-ce qu’un supercycle ?
Avec le temps, les investisseurs ont remarqué un changement cyclique dans le prix des matières premières sous l’effet de différents facteurs comme la guerre, les pénuries, la surproduction, etc. Ce changement était différent des changements de prix intermittents habituels suite à des perturbations soudaines de l’offre ou de la demande. En effet, il s’effectue sur une période plus ou moins longue, d’où le terme de supercycle.
Le phénomène des supercycles a été illustré avec des données de la Banque du Canada indiquant les prix au comptant des matières premières produites au Canada et exportées en dollars américains au cours du siècle dernier. Sur l’illustration ci-dessus, vous pouvez identifier 4 supercycles distincts, chacun couvrant une période de près de 20 ans.
Les partisans du supercycle du pétrole
Des investisseurs renommés de JPMorgan Chase et de Goldman Sachs ont été parmi les plus ardents défenseurs du supercycle pétrolier. Cristyan Malek, qui est à la tête de JPMorgan pour le pétrole et le gaz, a déclaré la semaine dernière aux clients de la firme lors d’une conférence que le prix du pétrole allait augmenter jusqu’à 100 dollars le baril, voire plus dans les années à venir.
Ce niveau n’a pas été atteint par le pétrole depuis 2014 et constitue un objectif pour le moins ambitieux. Néanmoins, M. Malek pense que la demande de pétrole va considérablement augmenter dans les années à venir avant que le monde ne perde son appétit pour cette matière première. Malek est soutenu par un analyste quantitatif de JPMorgan, Marko Kolanovic, qui pense que le 5e supercycle vient de commencer, principalement sous l’impulsion d’une forte reprise post-pandémique.
En fait, c’est Kolanovic qui a créé le graphique ci-dessus, indiquant le supercycle précédent et les facteurs qui l’ont provoqué. Jeffrey Currie, analyste chez Goldman Sachs, pense également que nous sommes au début du cinquième supercycle, mais que cette fois-ci, il ne sera pas dirigé par une Chine avide d’énergie, mais par des politiques monétaires et fiscales ultra-libres.
Selon M. Currie, le plan de relance de mille milliards de dollars proposé par l’administration Biden devrait créer une consommation importante et intensive en matières premières. Les personnes qui devraient bénéficier le plus de ce plan de relance sont les ménages à faibles et moyens revenus, que M. Currie a décrits de manière intéressante en disant : « Ces personnes ne conduisent pas des Teslas, mais des SUV ». En conséquence, la demande de pétrole devrait augmenter régulièrement et faire monter la valeur de l’or noir.
Quels sont les facteurs qui pourraient affecter les prix du pétrole ?
L’essor de l’OPEP
L’OPEP (Organisation des pays exportateurs de pétrole) était autrefois le principal influenceur de l’offre et de la demande de pétrole. L’organisation a perdu de son influence au profit des États-Unis, qui sont rapidement devenus un important producteur de pétrole grâce à l’amélioration des techniques d’extraction. La production des États-Unis a atteint un pic en mars 2020, lorsque le pays produisait 13,1 millions de barils par jour.
Ensuite, la crise sanitaire a provoqué un tarissement de la demande et une forte baisse du prix du pétrole, obligeant plusieurs mines à fermer. Le pétrole américain a subi un autre coup dur lorsque le président Biden a signé un décret visant à stopper le projet d’oléoduc Keystone XL, ce qui signifie encore moins d’approvisionnement. Dans le même temps, les membres de l’OPEP mettent enfin un terme à leurs querelles et ont convenu de réduire l’offre de pétrole.
Aujourd’hui, avec le retour de l’OPEP et la perte de pouvoir des États-Unis, il semble que le bloc envisage une augmentation des prix du pétrole. Sauf désaccord futur entre les membres de l’OPEP, le pétrole s’apprécierait de façon régulière.
Augmentation de l’offre en provenance de l’Iran
Sous l’administration Trump, des sanctions ont été intensifiées contre l’Iran, ce qui a entraîné une diminution de l’offre mondiale de pétrole d’environ 2,7 millions de barils. Sous le gouvernement Biden, le marché s’attend à ce que ces sanctions soient levées, ce qui entraînerait une augmentation de l’offre. Cependant, la probabilité que cela se produise bientôt semble peu probable puisque les deux parties ne parviennent pas encore à s’entendre.
Le Guide suprême iranien, l’Ayatollah Ali Khamenei, a mentionné que la nouvelle administration n’a pas encore garanti de meilleures relations. De plus, l’Iran a refusé de négocier tout accord tant que les États-Unis ne lèveront pas toutes les sanctions imposées après l’accord de 2015.
Si l’Iran reprend ses exportations de pétrole dans le monde entier, cette augmentation de l’offre devrait faire baisser le prix du pétrole, mais cela ne suffirait pas à stopper un supercycle. Néanmoins, c’est un facteur important à prendre en compte pour les investisseurs.
Reprise de l’économie mondiale
À l’exception de quelques pays d’Europe et des États-Unis, de nombreuses autres grandes économies sont en train de renaître. Malgré la crise, le PIB de la Chine est resté positif en 2020, tandis que les importations de pétrole en Inde en décembre 2020 étaient au plus haut depuis environ trois ans. Il est clair que l’économie mondiale se rapproche de la normalité, stimulée par l’espoir que les vaccins feront leur effet escompté.
La prospérité économique est l’un des principaux moteurs de la demande de pétrole, il semble donc que la demande de pétrole devrait augmenter en 2021.