Mardi, le géant américain du streaming a publié son bilan du premier trimestre 2021. Les chiffres dévoilés font notamment état d’une augmentation moins forte que prévu du nombre d’abonnés. C’est tout ce qu’il a fallu pour que, le lendemain, le titre Netflix dégringole de près de 10 %.
À deux millions d’abonnés près
Les résultats publiés mardi par Netflix montrent pourtant que son chiffre d’affaires a augmenté de 24 % par rapport à l’année dernière. Cela représente quand même une performance quand on prend en compte le fait que cette période coïncidait en 2020 avec le début des restrictions qui ont bloqué des millions de gens chez eux et offert de nouveaux abonnés à Netflix.
Le bénéfice d’exploitation a plus que doublé en glissement annuel pour atteindre 2 milliards, contre 958 millions de dollars au premier trimestre 2020, alors que le bénéfice par action est passé de 1,57 dollar fin mars 2020 à 3,75 dollars cette année. Tous ces bons chiffres n’ont pourtant pas suffi à satisfaire les investisseurs à New York. Netflix a en effet perdu 10 %. Étonnant ? Pas tellement.
Dans ses prévisions en début d’année, la société basée dans la petite municipalité de Los Gatos en Californie avait en effet promis aux actionnaires et autres analystes un total de 210 millions d’abonnés fin mars 2021. Objectif non atteint, car dans son rapport paru le 20 avril, Netflix a indiqué 208 millions d’abonnés à travers le monde. Si cela représente malgré tout une hausse de 14 % en glissement annuel, ces chiffres n’ont pas du tout été du goût des investisseurs à Wall Street.
« Nous pensons que la croissance des abonnements payants s’est ralentie en raison de la forte progression enregistrée en 2020 suite à l’arrivée de la pandémie de Covid-19 d’une part et d’un contenu plus léger au cours du premier semestre de cette année d’autre part », indiquait pourtant le communiqué du géant américain, pour expliquer cette légère baisse et tenter de rassurer les investisseurs.
Des explications qui n’ont vraisemblablement pas suffi, car la chute a continué le mercredi. Le titre se négociait à 508 dollars dans la soirée du 21 avril contre 549 dollars 24 h plus tôt. Il faut dire que Netflix se retrouve depuis quelques mois dans une véritable bataille avec d’autres plateformes de vidéos à la demande, la plus en vue étant Disney+. Les analystes prennent donc tout signe de méforme comme une défaite pour Netflix et une victoire pour son plus sérieux concurrent. Pourtant, Netflix a encore de beaux arguments à faire valoir.
Netflix ne s’affole pas !
Comme expliqué par le géant américain fondé en 1997, la relative baisse de la croissance du nombre d’abonnées intervient après une exceptionnelle année 2020. À cause de la pandémie de Covid-19 et des restrictions qui ont affecté la vie de millions de gens, la plateforme a enregistré un nombre inédit d’adhérents. C’est donc tout naturellement que la croissance diminue avec la reprise des activités et la fin du confinement.
De plus, la première moitié de l’année est assez maigre en matière de contenu. Pourtant tout n’est pas à jeter comme le témoignent les succès incroyables des séries La Chronique des Bridgerton ou Lupin, dans l’ombre d’Arsène. La dernière citée a d’abord établi un record historique de 70 millions de vues en quatre semaines. Ce record n’a tenu que peu de temps, avant que la série adaptée d’un livre de Julia Quinn ne lui ravisse la vedette avec 82 millions de vues en 28 jours. Et contrairement au premier semestre, beaucoup de belles choses attendent les utilisateurs pour le reste de l’année.
Netflix indique ainsi le retour au second semestre de séries qui ont rencontré un fort engouement sur la plateforme au cours des deux dernières années. Les suites de Sex Education, La Casa de Papel, You ou encore The Witcher sont vivement attendues par les abonnés. De même, le géant du streaming indique que plusieurs films originaux viendront renforcer le catalogue de la plateforme comme le final de la trilogie The Kissing Booth. Un casting de stars est également prévu avec des acteurs oscarisés, Leonardo di Caprio ou Cate Blanchett, et d’autres comme Dwayne Johnson et Ryan Reynolds.
« Nous continuons d’anticiper un second semestre fort avec le retour des nouvelles saisons de certains de nos plus grands succès et un programme de films passionnant », résume le groupe.
Si l’avenir à court terme semble si radieux, c’est aussi parce que Disney+, le concurrent le plus sérieux de Netflix est encore très loin. Seize mois après son lancement, la plateforme dépassait pourtant la barre symbolique des 100 millions d’abonnés, ce qui représente tout de même une sacrée performance.
Une menace bien réelle
Avec ses plus de 200 millions d’abonnés, Netflix n’a pas à s’en faire dans les deux à trois prochaines années en ce qui concerne sa domination sur le marché du streaming. Seulement, rien n’est éternel en affaires et les prévisions de certains analystes voient Netflix rattrapé par son concurrent avant la fin de la décennie.
Selon le cabinet américain Digital TV Research, Netflix sera dépassé par Disney+ en 2026. De quelque 100 millions actuellement, la plateforme atteindra en effet 294 millions d’abonnés dans cinq ans, contre seulement 286 millions d’abonnés. L’Inde serait l’arbitre de ce combat, car ce serait le seul pays dans lequel Disney dépassera réellement Netflix, avec 98 millions d’abonnés contre 13 millions pour son futur dauphin. Il faut dire que Netflix semble avoir atteint son maximum d’abonnés aux États-Unis, son principal marché. Cela devrait l’inciter à rechercher de nouveaux abonnés ailleurs dans le monde, pour contredire les analystes.
L’urgence de la diversification
Face à la menace croissante de Disney+, Netflix n’a plus d’autre choix que de conquérir de nouveaux marchés. Et pour cela, un terrain semble très bien indiqué : l’Afrique. Contrairement aux nations occidentales, le continent connaîtra un boom démographique sur les trois prochaines décennies. La population africaine passera en effet de 1,3 milliard en 2020 à 2,6 milliards en 2050, soit une hausse de 91 %. Essentiellement jeune, elle représentera pratiquement un terrain vierge pour les géants du numérique comme Netflix. Le groupe doit donc prêter une attention accrue au continent et commencer à proposer davantage de contenus locaux. La société a déjà acquis les droits de plusieurs films nigérians pour les diffuser sur sa plateforme.
Netflix a d’autres projets comme proposer par exemple des abonnements moins chers et dédiés au mobile à ses clients africains. Toutes ces initiatives peuvent accroître le nombre d’abonnés africains qui, fin 2019, se confond avec les abonnés européens et ceux du Moyen-Orient pour atteindre un peu plus de 47 millions.