Le géant français du pétrole et du gaz Total a annoncé la conclusion d’un accord avec Orange, leader dans les télécommunications, pour lui fournir de l’énergie renouvelable pendant 20 ans. Ce partenariat s’inscrit dans la politique de réduction de l’empreinte carbone lancée par les deux groupes afin de réussir leur transition énergétique. Vu l’engouement des investisseurs pour les projets de décarbonisation, cela devrait être bénéfique pour l’action en bourse de chacun des deux groupes.
2 000 GWH d’énergie renouvelable
Le contrat d’achat d’électricité renouvelable (Corporate Power Purchase Agreement) annoncé mercredi par Orange est impressionnant. Il porte en effet sur la fourniture annuelle de 100 gigawattheures (GWh) d’électricité pendant 20 ans, soit 2 000 GWh au total. Il s’agit d’un partenariat profitable aux deux parties à plusieurs égards. Alors qu’il assure à Orange un approvisionnement en énergie sur le long terme et de façon régulière, l’accord permet en outre à Total de développer sa capacité de production.
Quadran, la filiale du groupe pétrogazier spécialisée dans les énergies vertes devra en effet mettre en place de nouvelles infrastructures pour assurer ce nouveau contrat. Plus précisément, il s’agit de la construction, d’ici 2024, d’une dizaine de centrales solaires en France, avec une puissance totale estimée à 80 mégawattheures (MW). Par ailleurs, ce contrat d’achat d’électricité renouvelable correspond à la volonté d’Orange de participer à la lutte mondiale contre le réchauffement climatique.
Selon Fabienne Dulac, PDG d’Orange France, la signature du nouveau contrat est en ligne avec les objectifs du groupe qui ambitionne de réduire de 30 % d’ici à 2025 ses émissions de CO2 directes et intégrer 50 % d’électricité verte dans ses activités. Mieux, la compagnie veut atteindre la neutralité carbone en 2040.
Depuis plusieurs mois, il faut noter qu’Orange multiplie les actions pouvant lui permettre d’atteindre les objectifs énumérés ci-dessus. Son partenaire Total n’est pas en marge de cette tendance, démontrant l’importance que les sociétés accordent désormais à leur politique énergétique et environnementale.
Actions en faveur de l’environnement
Ces derniers mois, les groupes ArcelorMittal, FedEx, Glencore ou encore Delta Air Lines pour ne citer que celles-là, ont toutes annoncé leur intention d’atteindre la neutralité carbone au cours des deux ou trois prochaines décennies. Cette politique consiste spécifiquement à réduire les émissions de gaz à effet de serre générées par leurs activités et à trouver des voies et moyens pour compenser leur empreinte carbone.
Cette vague d’annonces reflète la pression que subissent les grands groupes afin qu’ils réduisent les effets de leurs activités sur l’environnement. Chez Orange, c’est le plan stratégique Engage 2025, qui résume en plusieurs points la politique environnementale de la compagnie, qui permettra notamment d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2040. L’accent est ainsi mis sur l’efficacité énergétique au niveau des équipements réseau, ce qui devrait aboutir par exemple à la diminution des émissions de CO2 des data-centers.
Pour Total, l’utilisation des sources d’énergies renouvelables, au détriment des énergies polluantes comme le pétrole, occupe une place centrale. L’un des objectifs d’Engage 2025 est en effet d’assurer 50 % des besoins d’électricité de la compagnie avec de l’énergie renouvelable dès 2025. C’est presque le double de la part du renouvelable enregistrée en 2019 (26 %). Toujours pour 2025, la société veut pouvoir développer des produits 100 % écologiques, grâce à une démarche de reconditionnement, de réparation et de recyclage.
Par ailleurs, afin d’accroître son impact, Orange ne se contente pas de mener uniquement ses actions au niveau de la société, mais propose également des solutions visant notamment ses clients. Le groupe veut aussi leur apporter son aide dans la lutte contre le réchauffement. En 2019 par exemple, l’ensemble des émissions de CO2 a été réduit de 64,2 % pour chaque client, par rapport aux niveaux de 2006.
Contrairement à son nouveau partenaire de télécom et ipso facto moins sujet aux critiques des écologistes, Total fait face à des attaques pour l’insuffisance de ses mesures en faveur du climat. Pourtant, le géant pétrogazier a montré ces derniers mois une certaine volonté à changer les choses, à commencer par la neutralité carbone.
Malgré la crise inédite traversée par l’industrie pétrolière en 2020 avec des pertes nettes pour la plupart des grands groupes, la société a annoncé en mai dernier son intention d’être carboneutre à l’horizon 2050, sur l’ensemble de ses activités dans le monde. Pour cela, la compagnie compte réduire ses émissions de niveau 1 et 2.
Il est important de noter aussi la part accordée au renouvelable avec notamment 10 % des investissements alloués à l’électricité obtenue avec le minimum d’émission carbone. Le groupe veut faire passer cette part à 20 % des investissements d’ici 2030 ou plus tôt si possible.
Selon Aurélie Baudhuin, directrice de la recherche ISR (Investissement socialement responsable) chez Meeschaert AM, si ces annonces sont louables, il manquerait néanmoins au groupe Total une feuille de route plus claire avec des objectifs intermédiaires chiffrés en ligne avec l’Accord de Paris.
Perception des investisseurs et impact à la bourse
Le titre Orange a connu cette semaine une hausse d’environ 4 %. Le groupe pétrolier français Total a également connu une embellie ces derniers jours à la bourse avec deux hausses consécutives le mercredi et le jeudi. Néanmoins, ce serait aller trop vite aller en besogne que d’y voir l’impact du partenariat conclu entre les deux sociétés françaises. Au final, il ne s’agit en effet que d’un accord portant sur la fourniture d’électricité renouvelable, alors que les activités principales d’Orange et Total sont les télécommunications pour l’un, et les énergies non renouvelables pour l’autre. À court terme, il ne faut donc s’attendre à aucune tendance de cause à effet.
Pour autant, nier l’importance des actions menées en faveur de l’environnement sur la perception qu’ont les investisseurs de ces deux sociétés serait également une erreur. En raison de la pression des politiques et d’une large partie de l’opinion publique internationale, les grands groupes sont en effet tenus de mettre en œuvre des mesures pour le climat.
Et ces diverses initiatives devraient améliorer l’image d’Orange et de Total auprès de certains investisseurs institutionnels. BlackRock, le plus grand gestionnaire d’actifs au monde, a ainsi exhorté en janvier dernier, les sociétés dans lesquelles elle investit, d’atteindre la neutralité carbone pour 2050 au risque de perdre l’appui du groupe.